×Fermer

Projet Humus

Note d'intention

Si notre travail de création se conçoit comme une archéologie du futur, de fragments d’imaginaires rassemblés enœuvre, c’est que créer, c’est chercher, c’est creuser.

Qu’il y a dans la figure du porteur quelque chose d’ultra terrestre, du sol même.

Erigeant sa verticalité à partir de la terre, du sol qui nous porte tous, dont nous sommes issu.es et où nous retournons.

Humus. ou Racines. ou Genèse.

Nous n’explorerons rien de moins que l’origine du monde et de l’humanité.

Le cirque relève d’un questionnement sur quelque chose d’ancestral, du mythe, de la genèse même. Comme si de l’humus même du sol s’érigeait le premier homme, sa première statue.

Le sol comme porteur, lieu de la fertilité, d’apparition de la vie, de composition et de recomposition.

Outre cette dimension symbolique qu’appelle la matière « terre », nous cherchons une analogie entre le geste acrobatique et circassien et le geste paysan.

Où la répétition du geste acrobatique fait écho à celle du labeur paysan. Où l’utilisation d’outils, emblématiques ou spécifiques, nous permettra un nouveau vocabulaire, celui d’un corps acrobatique étendu.

Creuser, cultiver.

Pour certains chercheurs, le concept d’Homo faber, d’homme qui fait, supplante celui d’Homo Sapiens, d’homme qui sait. Dit plus simplement : c’est le corps qui fait, le développement de la main, des techniques manuelles et corporelles, qui précède et crée l’intelligence. De ce long phénomène d’évolution et d’incorporation découle notre humanité.

La maturation et la transmission de gestes, forgent elles-mêmes notre bipédie, et surtout assurent dès l’aube des temps nos besoins essentiels : se nourrir et s’abriter.

La faim et le froid ont dû œuvrer souvent à l’élaboration des mouvements, des stratégies et des outils.

Par un subtil renversement des fins et des moyens, le jeu, ou en ce qui nous concerne, les jeux acrobatiques, nous offrent d’explorer en soi les possibles de ce corps.

Nos corps de cirque à l’œuvre, grimpant, creusant, soulevant, lançant, se font l’écho de dynasties de cueilleurs, de paysans, de bâtisseurs. Avec le geste acrobatique est convoqué celui de la vie de cirque itinérante : planter un pieu, tendre une toile, faire un nœud, ou autant d’échos aux éphémères châteaux de sable et cabanes de nos enfants.

Car le geste de cirque met en lumière un commun, une histoire universelle, ce corps et ces techniques dont nous héritons, et dont les capacités, intelligence comprise, doivent aujourd’hui nous interroger.

Si nous savons peu ou prou d’où nous venons, jusqu’où, vers où nous diriger aujourd’hui ?

Joyeusement low-tech, cette pièce de cirque aux accents paysans redessine une genèse poétique de nos interactions.

Axes de recherche

Tout travail honnête de création suppose d’arpenter d’abord des terrains inconnus.

Avant de se situer dans le temps de l’écriture définitive d’une forme donnée, il nous importe de prendre le temps de sillonner notre nouveau terrain d’investigation, afin de tester des hypothèses de travail, repérer des « endroits », assembler un tissu d’idées, de connaissances, et réunir une équipe, en piste et autour.

Nous nous proposons donc de mettre d’abord en place un cycle de 4 laboratoires de recherche :

LAB#1 – FOUIR

Quel joli mot, pour dire plus poétiquement creuser.

Fouiller, gratter, remuer le sol sur la trace de cette idée première d’un grand trou. S’intéresser à ce sol sur lequel nous vivons, ce sous-sol que nous connaissons peu, où nous semons notre nourriture, d’où nous érigeons nos bâtisses, où s’enracinent nos mythologies.

S’armer de bêches, de pelles et de pioches, y former des  creux et des bosses, jongler la terre, y entrevoir le sillon agricole en land art ou y ériger nos châteaux.

Intervenant pressenti : Marc André Selosse, professeur Muséum Histoire Naturelle
Participantes invitées pressenties : Andrea Sperotto, Analia Vincent

LAB#2 – ENDUIRE & MODELER / Statuaire et matière

Le cirque est un art vivant en 3 dimensions, il a à voir avec une dimension sculpturale. Dans de nombreuses mythologies, les premières créatures humaines sont modelées à partir de la terre.

Il s’agira ici de faire corps avec la matière !

De bains de boue en cataplasmes, s’amuser avec la notion du sale, et questionner notre représentation du corps, dans son apparence ou sa capacité, aux prises aussi avec la notion d’âge et de temps.

Enduit de glaise, recouvert de tourbe ou oint d’huile comme d’antiques lutteurs, que raconte alors ce corps acrobatique, que peut-il ou ne peut-il plus ?

Scénographiquement, s’il nous faut choisir une matière principale pour habiter un lieu, laquelle sera-t-elle ?

Intervenants pressentis : Claudio Stellato / Blaï Matteu Trias
Participants invités pressentis : Wayne Götz / performer

 

LAB#3 – L’OUTIL comme prolongement du corps / Le geste, le manche

S’il a d’abord dû faire face aux éléments à mains nues, comme le fait souvent d’ailleurs l’acrobate, l’humain s’est distingué par une propension à l’outil.

Prométhée même s’en questionne aujourd’hui, face à un techno-solutionnisme inextinguible.

Aux sources de ce développement pourtant, des solutions simples pour mettre la terre à portée, ou maintenir le danger à distance. Le simple bâton est devenu manche, et prolonge ses propres membres, la multiplicité des formes permet de préciser son geste.

En parfait accord avec notre démarche d’enrichissement du langage acrobatique, l’utilisation d’outils, emblématiques ou spécifiques, nous permettra un nouveau vocabulaire, celui d’un corps acrobatique étendu.

Nos premières intuitions vont vers des outils qui se plantent dans le sol, qui pourront nous fournir des appuis, un peu à la manière du piolet de l’alpiniste.

Le marteau de charpentier, avec sa tête courbée, nous permet lui une multitude de prises sur le corps même du partenaire, et convie le capitaine Crochet…

Le geste de la faux met en jeu une chorégraphie de la rotation fascinante, et l’action d’aiguiser une lame recèle aussi une puissante dramaturgie.

L’impact ou le tranchant d’un outil convoquant aussi la violence de l’arme, celle du chasseur, et celle plus improvisée de la révolte.

Intervenante pressentie : Valerie Souffron, Socio-anthropologue ; Centre d’études des techniques, des connaissances et des pratiques
Participant invité pressenti : Wayne Götz, performer

LAB#4 – FOLK, danses traditionnelles / sol, rythme, partenaire. Le chant de la terre.

Né à la fin des années 70, j’ai grandi à la campagne, baigné dans l’écoute du renouveau du folk, écho d’un premier mouvement de « retour à la terre ». Bercé de Malicorne, imprégné aussi d’oud, de vielle, de luth, de bodhran, de voix et d’instruments recomposés de diverses traditions, qui pour certains rythmaient des travaux des champs.

Cette riche tradition musicale, souvent liée à un terroir plus qu’à une nation, se mêle ici et là à diverses traditions chorégraphiques populaires.

La musique et la danse folk ont éminemment quelque chose à dire à notre projet.

Nous projetons une semaine de laboratoire en Slovénie, afin d’étudier ce qui de ces structures chorégraphiques pourra nourrir notre propre écriture.

Rythmes, frappes, percussion du sol, relation au partenaire ou au groupe fournissent des pistes de rencontre avec nos langages acrobatiques.

Il s’agit aussi de favoriser une rencontre avec un.e musicien.ne dont la pratique vocale et instrumentale pourra accompagner notre démarche.

Intervenant pressenti : Milan Tomasik : danseur Chorégraphe / les Slovaks
Participants invités pressentis :
Un/e musicien/ne des Arts Florissants / William Christie
Daniel Kvašňovský, artiste de cirque / danseur

 

INSPIRATION - Humus, de Giuseppe licari

« Je suis particulièrement intéressé par la façon dont notre environnement a été transformé au cours du siècle dernier grâce à la révolution industrielle et à sa grande accélération.

Depuis la révolution néolithique, […], l’humanité n’a cessé de s’éloigner et de s’opposer au monde naturel. La nature est devenue un concept à exploiter plutôt qu’un lieu où vivre en harmonie. Nous sommes désormais conscients que la vie en dehors du monde naturel n’est pas possible. Notre impact sur le monde naturel est si énorme qu’il a été défini comme une nouvelle ère géologique. […].

Il s’agit d’un environnement hétérogène proche de la surface dans lequel des interactions complexes impliquant la roche, le sol, l’eau, l’air et les organismes vivants régulent l’habitat naturel et déterminent la disponibilité des ressources nécessaires au maintien de la vie. La société capitaliste a été motivée par l’exploitation constante des ressources naturelles et par une croissance à l’infini. Cela laisse derrière lui une nouvelle couche de patrimoine culturel (déchets, mines, pollution, sols appauvris), qui parle haut et fort de notre société et de ses habitudes en termes anthropo-géologiques.

Cette nouvelle couche que nous avons créée est l’humus sur lequel les générations futures d’humains et de non-humains devront vivre. »

https://giuseppelicari.com/humus.html

Equipe & partenaires

Direction artistique : Alexandre Fray
Artistes de cirque : Alexandre Fray, Špela Vodeb, Calou Rais et Antonin Wicky
Musicien.ne live : En cours

Intervenant.es laboratoires : En cours

Regard extérieur : Claudio Stellato
Scénographie : En cours
Accompagnement dramaturgique : En cours
Régie : Rémi Athonady, Léo Debeugny

Administration, production, diffusion : Lou Henry, Chloé Vancutsem, Emma Lefrançois

Production : Un loup pour l’Homme

Coproductions : Le Prato – Pôle National Cirque à Lille (59), Cirque Jules Verne – Pôle National Cirque Amiens (80), Réseau 4HDF dans le cadre du Plan Mieux produire mieux diffuser (en cours)

Soutiens pour les labos de recherche préliminaires : Commande d’un « Cirque agricole » initiée par 13e sens/Festival Pisteurs d’étoiles à Obernai (67), CCOUAC Ecurey (55) (en cours)

 

La compagnie Un loup pour l’Homme est conventionnée par la DRAC Hauts-de-France (2025-2028) et soutenue au programme d’activités par la Région Hauts-de-France.

Elle est compagnie associée au projet du Prato, Pôle National Cirque de Lille, et sera artiste acolyte du Cirque Jules Verne, Pôle National Cirque d’Amiens en 2027-2028.

Résidences à venir

Obernai (67) Projet Humus 19/04>03/05/2026

LABO CIRQUE AGRICOLE – expérimentations autour de Projet Humus à 13e sens à Obernai (67) avec présentation de la recherche dans le cadre du Festival Pisteurs d’étoiles les 1er et 2 mai 2026 !

 

+ de dates